jeudi 1 septembre 2011

Président Hollande

Après des débuts timides, on peut dire que la primaire Socialiste bat son plein en cette rentrée politique, quelques jours après la fin des Universités d'été de La Rochelle. Alors que des hommes comme Manuel Valls ou Arnaud Montebourg avaient décidé de rentrer très tôt dans la course à l'investiture, les sondages, encore eux, ne font guère de doute: Martine Aubry et François Hollande tiennent le pavé. S'il faut rester prudents en matière de sondages - en effet, les sondages expriment une opinion des Français alors que seuls les sympathisants de gauche seront amenés à se prononcer - il ne fait guère de doute que ces deux "éléphants" seront ceux qui disputeront le sprint final.

On peut regretter cet état de fait, Valls ou Montebourg ayant des qualités évidentes. Le premier a des positions très pragmatiques en matière de sécurité ou d'économie, qui tranchent avec le discours général du parti tandis que le second a eu un certain courage avec la révélation de l'affaire Guérini dans les Bouches du Rhône. Malgré les discours de bonne volonté, on a une fois de plus affaire à une lutte entre des ténors de l'appareil, et la prime à la jeunesse dont avait bénéficié Ségolène Royal semble loin à présent. Peut-être que son inexpérience sur certains points ou son aveu d'erreurs de programme après sa défaite en ont refroidi certains, toujours est-t-il que même elle ne semble plus en mesure de l'emporter aujourd'hui.

Le départ de DSK a redistribué les cartes. Si j'avais dû faire ce même papier il y a quelques mois, je l'aurais intitulé "Président DSK" et je n'aurais pas été très original tant l'affaire semblait entendue. Son départ a laissé un boulevard inattendu à François Hollande, qui n'est pourtant pas son fils spirituel, tant sur le plan humain qu'idéologique. Martine Aubry a donc décidé d'y aller, après avoir soufflé le chaud et le froid pendant de longues semaines.

Elle peine à cacher qu'elle n'aime pas ça. Une élection Présidentielle est avant tout médiatique. On peut le regretter mais c'est comme ça. Martine Aubry n'aime pas ça. Elle n'aime pas les interviews (elle y est même mal à l'aise) et fuit les studios de télévision dès qu'elle en a l'occasion. Depuis quelques jours elle a un petit regain de combativité et ses sorties sont très remarquées alors que François Hollande a décidé d'aller sur le terrain en ayant un agenda de rencontres avec les Français digne de celui d'un Président en exercice.

Il est souvent reproché à Hollande de n'avoir aucune expérience ministérielle, comme si on préférait quelqu'un avec une expérience, même peu probante, à quelqu'un qui a bien d'autres qualités à mettre en avant. Car des qualités, François Hollande en a, à commencer par sa normalité revendiquée justement. Et il est vrai que cela apaise. Entre tous les égos souvent démesurés de nos gouvernants, ou la personnalité mi figue mi raisin de Martine Aubry, François Hollande est indéniablement normal. Jamais un mot plus haut que l'autre, rarement déstabilisé, toujours un sourire, une petite blague, Hollande est passe-partout, on connaît tous un mec comme lui. C'est ce qu'on appelle un "bon Français", celui qui ne fait pas de vagues, avec qui on aime discuter et qui est loyal. Mais est-ce ça que l'on recherche? Nicolas Sarkozy aussi a été élu car il nous "ressemblait". Lui aussi était le Français type: celui qui sort un peu de ses gonds lorsqu'on le pousse à bout, celui qui a l'insulte facile, celui qui prend des décisions en fonction de son émotion du moment,...

Le handicap de Martine Aubry, c'est qu'elle n'est sans doute pas assez normale. Ou elle l'est mais ne le montre pas. Dans le fond, on ne la connaît pas vraiment car elle a décidé depuis toujours d'être discrète. Ce choix l'honore à une époque où il est de bon ton de présenter ses enfants à la une de Paris Match mais risque de la desservir sur le long terme. On a besoin de connaître, de s'identifier, d’apprécier ou détester, mais on veut connaître! 

Hollande rassure autant qu'Aubry terrorise. La Maire de Lille symbolise la gauche de la gauche, celle qui veut ouvrir les vannes de l'assistanat ou de la régularisation, celle qui défend les Roms mais adapte les horaires de ses piscines publiques pour des motifs religieux. Et puis elle restera à jamais la dame des 35 heures. Qu'on aime ou qu'on aime pas, cette question fait débat. Sans être DSK, François Hollande semble plus posé et réfléchi sur les questions sociétales et économiques, moins extrême, plus "social-démocrate" comme on dit. Il n'en reste pas moins que l'on peut légitimement se demander pourquoi il n'y a pas été plus tôt alors qu'il a été Premier Secrétaire du parti pendant de nombreuses années. Un Premier Secrétaire, ça s'impose aussi, et les primaires de 2006 n'avaient pas forcément lieu d'être. C'est peut-être fort de tout ça que François Hollande se lance aujourd'hui. Il a fait des concessions en 2007 pour ne pas revivre un "21 avril" mais il sent que la situation exige à présent qu'il se présente face aux Français.

La vérité, c'est que le candidat providentiel n'existe pas. DSK était ce candidat, mais il est définitivement disqualifié et ce n'est pas la relaxe New-Yorkaise qui y changera quelque chose, au contraire: trop de questions restent en suspens.

Même Nicolas Sarkozy n'est plus providentiel. Il va se présenter en pompier pyromane. Au centre Bayrou - et peut-être Borlooo - va tenter de faire figure d'homme de la situation, pendant que Marine Le Pen proposera ses solutions pour sortir de la crise, et surtout de l'Euro en fait. Je ne ferai pas insulte à Jean-Luc Mélenchon, ou aux Verts d'omettre leur participation, mais le mode de scrutin Présidentiel ne leur est pas favorable par nature et la course à l'Elysée se jouera entre ceux que j'ai nommé.

Dans ce contexte, je pense que François Hollande remportera les primaires assez nettement. J'ajoute même que face à une telle désespérance, face à une telle déception de l'action de Nicolas Sarkozy, il sera élu Président de la République au soir du 6 mai 2012. Mais après tout les pronostics sont faits pour être déjoués.

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